Le 22 mai dernier, Justine Slomian a défendu avec brio sa thèse de doctorat en sciences de la santé publique intitulée :

« Expérience maternelle en période postnatale : Exploration des besoins et tentative de réponse à l’ère du numérique ».

Le projet Happy Mum avait pour objectif d’accompagner le travail de thèse de Justine Slomian, et permettre d’évaluer si et comment les nouvelles technologies pouvaient aider les mamans en période postnatale.

Deux projets ont vu le jour dans le cadre de cet accompagnement, le site internet supermaman.be et le service Happy Gift.

Dans sa thèse Justine présente toute la méthodologie qui a permis d’aboutir à ces deux projets, ainsi que les résultats de l’évaluation de ces projets.

Le manuscrit complet de la thèse est en cours de publication sur ORBI.

Résumé

Bien que la naissance d’un enfant soit vue comme un évènement heureux dans notre société, la période postnatale constitue, la plupart du temps, une étape stressante engendrée par un changement intense et assez soudain dans le rôle et les responsabilités des mères. Au vu de toutes les perturbations rencontrées par les mères, cette thèse de doctorat avait pour objectif premier d’explorer les besoins maternels en post-partum. Pour ce faire, 22 entretiens individuels avec des mères ainsi qu’un focus group réunissant plusieurs mères ont été menés. Après de riches interactions avec les mères, quatre grandes catégories de besoins ont ainsi été mises en évidence : le besoin d’information, le besoin de soutien psychologique, le besoin de partage d’expériences et le besoin de soutien pratique et matériel. Les femmes ne se sentent ni assez informées dans cette période de vie difficile ni assez soutenues au point de vue psychologique. Elles sont souvent fatiguées et se posent beaucoup de questions. Elles ont besoin de partager cette expérience de vie, d’être rassurées et de se sentir comprises.

Tentant de répondre à leurs besoins, il semble que les femmes, déjà durant la grossesse, se tournent de plus en plus vers les outils numériques, y compris internet. Un deuxième objectif de cette thèse était alors d’évaluer si les femmes continuaient à utiliser ces outils numériques en vue de répondre aux questions rencontrées durant le post-partum via un large sondage en ligne ; ce qui a été confirmé. Ce sondage a également souligné le manque de confiance accordée envers les sites existants de la part des mères. Étant donné que les outils existants semblent ne pas satisfaire les utilisatrices principales, l’idée de développer de nouveaux outils numériques en vue d’essayer de répondre aux besoins maternels prenait alors tout son sens.

Encore fallait-il cibler des outils numériques qui soient cohérents envers les attentes maternelles. Deux ateliers de co-création, l’un avec des parents et des professionnels de la santé et de la petite enfance et l’autre avec des experts en technologies, ont été menés afin de déterminer, d’abord, la liste des critères qu’il est nécessaire de développer dans les futurs outils numériques et d’imaginer, ensuite, des outils numériques pouvant répondre aux besoins maternels tout en respectant les critères antérieurement mis en évidence. Plusieurs solutions numériques visant à répondre aux besoins maternels ont été ainsi investiguées dans le cadre de cette thèse (ex : système de vidéoconférence, Newsletter informatique préprogrammée, applications de serious gaming, système de géolocalisation, site centralisé dédié aux systèmes de garde, système de marrainage, forums dédicacés supervisés par des professionnels, etc.).

Au terme de cette investigation, deux outils numériques ont été sélectionnés et dès lors développés de toute pièce (contenu et design), avec l’aide de parents (tant des mères que des pères) et de professionnels de la santé et de la petite enfance :

  • Premièrement, un site internet centralisé (supermaman.be) et dédié aux mères depuis la fin de leur grossesse jusqu’à un an après leur accouchement a été développé. Des priorités en termes de thématiques à traiter au sein du site internet ont été convenues au moyen d’une méthode Delphi réunissant tant des parents que des professionnels. Le contenu de supermaman.be a ensuite été produit en collaboration avec des professionnels et experts des thématiques traitées. La conception graphique de ce site a été réalisée par un sous-traitant et ses fonctionnalités ont été validées par deux nouveaux ateliers de co-création. Les parents et les professionnels ayant participé à la méthode Delphi ont alors été recontactés afin d’exprimer leur opinion quant à supermaman.be. Attribuant un note moyenne de 8,00 ± 1,00 /10 concernant la qualité des informations trouvées sur supermaman.be, leurs impressions étaient plutôt positives et ont laissé place à quelques améliorations. supermaman.bee a également été testé dans une large population de mères sous forme d’une étude interventionnelle : la moitié des femmes ayant eu accès à supermaman.be et l’autre non. Une évolution similaire des besoins maternels a été mise en évidence dans les deux groupes mais aucun effet potentiel de supermaman.be sur ces besoins n’a pu être dégagé. Cependant, la qualité des informations issues de supermaman.be a, une fois de plus, été jugée bien meilleure que celle des sites internet tout venant (note moyenne attribuée quant à la qualité : 7,22 ± 1,37/10 vs. 5,29 ± 1,48/10 sur les autres sites internet ; p<0,0001).

 

  • Deuxièmement, un système de bons-cadeaux à faire valoir (Happy Gift) a également été élaboré en vue de répondre essentiellement au besoin de soutien pratique. Offrir un service d’aide à une mère (ex : tâches ménagères, activités avec les aînés, etc.) plutôt que des biens matériels constitue le but de ce second outil. La numérisation d’un tel système a pour objectif principal d’accompagner les mères ainsi que les offreurs dans la concrétisation de l’offre en rappelant aux deux parties de ne pas oublier de profiter (ou de réaliser) du(le) service offert. Les intitulés des bons ont été conçus avec l’aide de parents et d’offreurs potentiels et la conception graphique de cet outil a été réalisée par un sous-traitant. Un premier test utilisant les mères comme utilisatrices de Happy Gift (et donc comme demandeuses d’aide) n’a pas fonctionné. Au vu du besoin de soutien pratique et matériel prononcé ainsi que de l’enthousiasme initial des mères autour de ce projet, ces résultats n’étaient pas forcément attendus. Plusieurs hypothèses émises en regard de cet échec ont été formulées et poussent à croire que le projet pourrait fonctionner à condition d’entreprendre certaines modifications. C’est la raison pour laquelle l’outil Happy Gift a été réorienté en vue d’un second test utilisant, cette fois, les offreurs potentiels comme utilisateurs principal de l’outil.

Bien que les dimensions humaines et psychologiques soient prédominantes et non négligeables durant la période postnatale, plusieurs outils numériques peuvent apparaître comme une solution complémentaire et utile en guise de réponse aux besoins maternels ; particulièrement dans le contexte actuel des sorties précoces de la maternité. Les outils développés dans le cadre de cette thèse constituent des pistes de solution qu’il est nécessaire de promouvoir et de réévaluer à large échelle afin d’en mesurer les effets sur la satisfaction et sur les besoins maternels.