Sur le modèle du BOB qui vous ramène à demeure en toute sécurité et sans alcool, le Réseau des aidants a lancé son concept : SAM, l’aidant plus ou moins proche prêt à s’occuper à différents niveaux d’une personne en perte d’autonomie. Êtes-vous un SAM ?

La genèse du projet remonte à 2016. L’asbl Aidants Proches Bruxelles dépose un projet à la Fondation Roi Baudouin. Elle obtient alors un financement pour la mise en place d’une plateforme d’information à destination des aidants-proches et lance alors le concept de ‘SAM’. L’association passe alors le relais à l’asbl SAM le Réseau des Aidants, créée spécifiquement pour porter ce projet qui s’étend alors à la Wallonie.

Nombreuses sont les causes à l’origine de la perte d’autonomie (Alzheimer, autisme, handicap moteur, etc.). Ce réseau vise ainsi à se rapprocher du quotidien des aidants tout en tenant compte des particularités de leurs difficultés propres, une approche ainsi centrée autour de l’utilisateur comme on les apprécie au sein des living lab tel que le WeLL.

Par ailleurs, si cette démarche tient compte de l’état des personnes atteintes, elle met surtout l’accent sur la santé mentale des aidants-proches, tel que Marine Salou, Directrice de ce réseau, nous le raconte.

 

 

Quelle était votre intention avec la création de ce concept ?

Marine Salou : Nous souhaitions travailler avant tout à la prévention. Si on prend la maladie d’Alzheimer par exemple, une étude a montré qu’un tiers des aidants décédaient avant les personnes aidées. La charge mentale des aidants est extrêmement lourde et les épuisements, voire les burn-out, sont fréquents.

La notion d’aidant-proche est encore aujourd’hui difficilement identifiable par « Monsieur tout le monde ». Pour la plupart d’entre eux, ils sont d’abord une maman, un papa, un enfant, un proche, etc. Leur soutien aux personnes en perte d’autonomie leur paraît comme ‘normal’. Ils se mettent alors dans une dynamique d’aide où leur vie doit parfois être mise entre parenthèses. Comme ils ne sont pas eux-mêmes malades, ils n’osent pas toujours demander de l’aide. C’est là qu’est né le concept de SAM : un homme ou une femme qui contribue de façon plus ou moins importante au quotidien d’une personne dans le besoin. Utiliser ce nom, un peu comme celui de BOB, revient à parler de cette réalité de façon décomplexée pour se présenter sans devoir répondre à des questions parfois délicates.

 

Au-delà cette identité SAM, vous avez également mis en place une plateforme. Dans quel but ?

M.S. : Souvent des aidants proches entament des démarches pour obtenir de l’aide quand ils sont déjà en situation d’épuisement. La plateforme vise à donner accès des informations de façon préventive. Que ce soit sur les aides possibles, sur les dispositions légales, sur les groupes d’échanges, etc.

Une fois qu’une personne se reconnaît comme étant un SAM, elle va sur la plateforme et peut y trouver des informations sur tous les types de dispositifs existants pour l’accompagner, même des choses auxquelles elle n’aurait pas pensé spontanément.

 

Comment est-ce que cette plateforme a été construite ?

M.S. : Dans un premier temps, nous avons recruté des aidants-proches ‘partenaires’ pour avoir une vision de leurs besoins et des informations utiles à mettre en avant. C’est sur base de leurs expériences et leurs retours que nous avons construit le cahier de charge. Celui a été présenté en janvier 2017.

 

En d’autres termes, vous vous êtes appuyés sur des pairs-experts…

M.S. : Nous avons utilisé la méthodologie patient-partenaire de l’ULB. Il s’agit de s’appuyer sur les connaissances et les expériences des aidants-proches partenaires tout en ajoutant un complément des savoirs des professionnels.

Toute l’architecture de la plateforme a d’ailleurs été validée par un groupe composé de professionnels et d’aidants proches partenaires et les contenus passent par le filtre d’une grille d’évaluation déterminée par l’équipe des aidants proches partenaires et les professionnels.

 

Il est aujourd’hui possible de consulter le site sans forcément s’inscrire.

M.S. : Il y a en effet 2 façons d’utiliser l’outil.

Soit en accédant simplement aux informations disponibles : que ce soit les articles ou les dossiers thématiques (exemples : la maladie d’Alzheimer, la schizophrénie, la parentalité aidante, le stress, etc.), l’annuaire médico-social avec tous les contacts utiles ou encore en consultant le forum avec les questions et réponses postées par d’autres.

Soit en s’inscrivant pour participer de façon active. Il est alors possible d’accéder à un tableau de bord avec une logique de favoris et où l’on peut retrouver des articles que l’on a sélectionnés. Les participants actifs peuvent également poster des commentaires, lancer des sujets sur le forum et répondre, être en contact direct avec d’autres SAM via un chat privé pour échanger avec d’autres membres qui vivent une réalité similaire, etc.

Face une question posée, la réponse peut tantôt émaner d’un autre utilisateur, tantôt être proposée par un des partenaires experts. On retrouve parmi ces partenaires, Alzheimer Belgique, l’asbl Inclusion, Infor-homes, Droits quotidiens et beaucoup d’autres.

 

Vous avez également mis en avant des visages connus sur la plateforme, comme le comédien François Damiens, le journaliste Hugues Dayez ou encore le chroniqueur Gilles Dalles. Une façon de dire que tout le monde peut être un SAM ?

M.S. : Nous espérons évidemment valoriser leur notoriété pour toucher la plus large audience possible. Avec cette campagne « je suis SAM » s’appuyant sur leurs témoignages, nous souhaitant faire passer le message « On peut tous être SAM ! Tous les aidants proches sont des SAM mais tous les SAM ne sont pas forcément aidants proches … certains sont simplement des voisins, des amis, …à chacun sa manière d’être SAM ». Nous pouvons tous être en situation d’aide pour une personne dans le besoin sans forcément être liés par un engagement familial ou autre.

En travaillant à la prévention et en facilitant l’accès à l’information et les interactions avec la communauté des SAM, nous souhaitons soulager le quotidien des aidants et faire prendre conscience de cette réalité au plus large nombre possible.

 

Le site a été mis en ligne en octobre 2018. Comment se porte-t-il aujourd’hui ?

M.S. : Après un an d’existence, on constate que la plateforme se développe bien, tant au niveau du contenu que de la fréquentation. On est aujourd’hui à plus de 10.000 visiteurs mensuels avec une progression de +500% sur un an. Nous avons près de 1.400 inscrits actifs qui peuvent contribuer au forum et/ou ou « chatter » ensemble. Nous avons réussi (sur 12 mois) à toucher plus de 300 000 personnes à travers nos différents canaux de communication (web, réseaux sociaux, permanence téléphonique).

Le projet a d’ailleurs été nominé comme Bruxellois de l’année en 2018. Même si nous n’avons pas remporté le prix, nous en sommes quand même très fiers.

Nous souhaitons aujourd’hui développer une application mobile pour toucher une plus large audience. On voit par exemple que beaucoup de nos usagers consultent la plateforme via leur smartphone ; de même, la population plus âgée utilise beaucoup les tablettes tactiles. Notre outil doit donc être mieux adapté à ces supports. Nous venons d’obtenir le financement. Le projet devrait voir le jour en 2020.