Si la start-up aura bien été au bon endroit, au bon moment, il n’en reste pas moins que ZenTech aura surtout démontré une agilité utile en déployant ses tests sérologiques pour détecter la présence d’anticorps pour contrer le Covid19. Retour sur le parcours de ce test avec Eric Poskin, Corporate Strategy Adviser en charge de la communication chez ZenTech.

 

ZenTech est une start-up initialement spécialisée dans le dépistage de maladies génétiques chez les nouveau-nés. Elle met sur le marché depuis des années des kits de tests et possède ainsi un savoir et savoir-faire important tant en ce qui concerne le développement de ce produit que les procédures administratives pour obtenir toutes les certifications nécessaires à leur commercialisation.

 

En 2015, elle crée une joint-venture avec une entreprise chinoise de Hanzhou, Zheda Dixun, pour développer des tests sérologiques. C’est ainsi que, dès le début de la crise du Covid19, cette collaboration a permis, grâce au partage d’expertise, la création rapide et conjointe d’un test pour détecter si une personne a eu une réaction immunitaire au coronavirus et si elle développe ou a développé des anticorps. Le kit permet ainsi d’identifier en 10 à 15 minutes, soit une durée très courte, les porteurs sains (individus immunisés, porteurs du virus, mais ne développant pas la maladie) et les malades. « Vu le déploiement et l’utilisation positive du produit en Chine, il nous a paru opportun d’entamer les démarches nécessaires pour utiliser aussi cette solution en Belgique. » C’est ainsi que, dès le mois février, la start-up lance plusieurs initiatives : l’agrément pour marquage CE, mais aussi des procédures de validation par des entités scientifiques indépendantes. « La société a transmis 500 tests sérologiques au CHU de Liège pour les évaluer dans le cadre d’un processus de screening en milieu hospitalier », nous raconte Eric Poskin, chargé de la communication de ZenTech. Ils ont été utilisés sur des patients qui avaient notamment déjà été identifiés positifs par un dépistage biologique PCR (tests de dépistage utilisés depuis le début de l’épidémie en Belgique). Et les résultats ont abouti à la validation du kit sérologique par l’hôpital liégeois. » C’est ainsi que l’efficacité pour détecter l’absence du virus (ce que l’on appelle la spécificité[i]) atteint un taux de 98%, en d’autres termes, le risque de faux négatifs est de 2%. La sensibilité du test, quant à elle, est de 100%, donc il n’y a pas de risque de faux positifs. « Il faut préciser que ce kit n’est pas un autotest. Il n’est stricto sensu dès lors pas concerné par l’Arrêté royal du 17 mars 2020 qui interdit de tests rapides à réaliser chez soi par tout un chacun. » Au bout de toutes ces démarches, l’AFMPS (Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé) a émis son homologation pour le test le 16 avril dernier.

 

Un délai trop long pour obtenir les agréments… ?

 

« Non, c’est un délai qui est normal », nous répond le chargé de communication de ZenTech. « En temps de crise, nous aurions apprécié que la procédure soit peut-être un peu plus transparente et rapide. Mais il n’est pas question pour nous de remettre en question ces démarches. Elles garantissent aussi la protection des utilisateurs par rapport à toute l’offre disponible dans ce domaine. » La question est d’autant plus importante que des vies sont concernées. « Si l’on prend l’exemple d’un test de grossesse, sans vouloir minimiser les conséquences d’un faux positif ou d’un faux négatif, l’utilisatrice aura la possibilité de ‘se retourner’ si le test ne se révèle pas fiable et cela ne mettra pas en danger la vie d’autrui. Ce qui n’est pas le cas pour un test d’immunité dont le résultat aura un impact conséquent et sur le court terme. Dans ce genre de situation, on ne peut pas se permettre un manque de fiabilité. »

 

A titre de comparaison, Eric Poskin cite encore les masques chirurgicaux arrivés en Belgique, mais dont les agréments n’étaient pas valides. « J’imagine qu’on aurait pu les tester sur place et leur fournir la certification nécessaire s’ils s’avéraient alors finalement conformes. Néanmoins, si ces agréments sont parfois difficiles à obtenir, ils permettent aussi de filtrer les démarches commerciales peu scrupuleuses de celles dont l’objectif est réellement d’améliorer la santé des utilisateurs. »

 

De l’agilité pour une production de 5 millions de test

 

Le défi étant urgent et majeur, la start-up a mis en place la production de test au niveau local. « Nous souhaitions, confirmait dernièrement Jean-Claude Havaux, Président-Fondateur de ZenTech, pouvoir répondre le plus rapidement possible aux besoins essentiels des institutions et organismes de soins en matière de screening de leur personnel et des patients en Belgique sans être tributaires d’embargos ou de délais de livraison liés à des restrictions douanières. » C’est ainsi qu’elle a décidé de collaborer avec les Ateliers Jean Del’Cour, un établissement de travail adapté situé sur les hauteurs de Liège et agréé par l’AVIQ (l’Agence wallonne pour une Vie de Qualité) afin de fabriquer cinq millions de tests sérologiques. « Nous sommes d’ailleurs en train de constituer le stock de matières premières pour pouvoir les produire et nous préparons également à produire des quantités supplémentaires qui pourraient être nécessaires par la suite. »

 

S’il y a des choses à apprendre de cette pandémie, ce sera « l’importance de cette capacité à être agile, à prendre des risques pour avancer et proposer des solutions bénéfiques à la population tout en respectant les règles et les procédures », conclut Eric Poskin.

 

 

 

[i] Définition, d’après l’Université de Namur, de la spécificité et de la sensibilité d’un test :

La sensibilité (Se) est la probabilité qu’un test réalisé sur une personne malade se révèle positif; autrement dit, que le test soit positif sachant que la personne est malade. La sensibilité correspond donc au nombre de personnes malades et positives au test (vrais positifs) parmi l’ensemble des personnes malades

La spécificité (Sp) est la probabilité qu’un test réalisé sur une personne saine se révèle négatif; autrement dit, que le test soit négatif sachant que la personne n’est pas malade. La spécificité correspond donc au nombre de personnes non-malades et négatives au test (vrais négatifs) parmi l’ensemble des personnes non-malades.